L’illusion de la rénovation énergétique !
Le gouvernement a annoncé en octobre une série de mesures pour renforcer le dispositif MaPrimeRénov’ en 2024 et accélérer la rénovation énergétique du parc immobilier. L’objectif de l’État est de favoriser l’accompagnement des Français pour atteindre les objectifs climatiques du pays.
Quelles sont ces mesures et seront-elles efficaces ? Les efforts de rénovation énergétique ont-ils permis de diminuer nos consommations ? Quels sont les enjeux pour les prochaines années ?
Mais, d’abord, que prévoient les annonces gouvernementales pour 2024 ?
Dans le cadre du projet de la loi de finances 2024, le gouvernement a augmenté de 1,6 milliard d’euros le budget pour financer l’aide à la rénovation énergétique, portant l’enveloppe globale à 5 milliards pour l’année prochaine.
L’objectif est d’améliorer l’étiquette du DPE de 2 millions de logements en 2024 avec parmi eux 200 000 rénovations d’ampleur.
Quelles sont les principales mesures accompagnant cette annonce ?
Essentiellement, l’État favorisera les rénovations d’ampleur avec au moins deux gestes d’amélioration des performances énergétiques.
Ensuite, l’aide à la prise en charge des travaux est augmentée jusqu’à 70 000 € et 90 % du montant des travaux pour les foyers très modestes.
Pour finir, les rénovations d’ampleur devront être accompagnées systématiquement par un accompagnateur Rénov’ qui est un tiers de confiance indépendant agréé par l’État.
Ces mesures pour inciter les foyers à réaliser des travaux de rénovation ont-elles un impact réel sur les consommations d’énergie ?
Les rapports annuels sur les chiffres clés de l’énergie révèlent qu’entre 2000 et 2010 la consommation moyenne d’énergie finale dans le secteur résidentiel était constante aux alentours de 500 TWh/an.
En 2021, plus de dix ans après, nous consommons toujours environ 500 TWh/an.
En 2022, seuls les ménages ont baissé de 15 % leur consommation. Une baisse liée aux efforts de sobriété des Français pendant la crise énergétique et à un hiver plutôt clément.
Combien pèse l’investissement dans la rénovation énergétique en France ?
Par exemple, en 2019, trois millions de ménages résidant dans une maison individuelle en France métropolitaine ont terminé au moins un geste de rénovation.
Les dépenses totales associées aux matériaux, matériels et mains-d’œuvre de ces travaux s’élèvent aux alentours de 28 milliards, soit un peu plus de 9 000 euros par foyer passé à l’action.
Pour quelles raisons tout cet argent dépensé dans la rénovation énergétique n’a-t-il finalement que peu d’impacts sur nos consommations ?
Principalement parce que les rénovations partielles ou les monogestes individuels de rénovation énergétique, incités par l’État depuis plusieurs années, comme refaire l’isolation des combles ou simplement changer ses fenêtres ne permettent pas de diminuer les consommations d’énergie.
Ce type de pratiques ne traite pas les différents éléments de l’enveloppe d’une habitation comme la continuité de la migration de la vapeur et de l’étanchéité à l’air ou encore le traitement des ponts thermiques.
Or ce traitement partiel des postes de travaux énergétiques génère des sensations d’inconfort pour les occupants compensés la plupart du temps avec une augmentation de la température par le chauffage.
Quelles conclusions faut-il en tirer et que faudrait-il faire ?
La principale conclusion est que seules les rénovations globales et performantes pour viser le niveau BBC (Bâtiment Basse Consommation) ont un impact significatif sur les consommations d’énergie.
Malheureusement, le gouvernement, avec les nouvelles mesures, continue de favoriser la rénovation par addition d’au moins deux gestes individuels d’isolation. Ce qu’il appelle en jouant sur les mots une rénovation d’ampleur.
La clé fondamentale de la réussite est de mettre en place un parcours d’accompagnement pour chaque ménage, quelles que soient les conditions de revenus, avec un cahier de conception et des étapes précises de travaux et de financement pour respecter les principes d’une rénovation globale et performante.
Pour finir, il me semble nécessaire et urgent de développer des incitations financières pour favoriser les comportements d’économies d’énergies et éviter le fameux effet rebond que nous avions abordé dans une précédente chronique.
Ce sont, finalement, les efforts de sobriété des Français l’hiver dernier qui ont eu le meilleur résultat sur la baisse des consommations ces 20 dernières années.
Guillaume MILLO
Expert en rénovation de bâtiments anciens
Auteur – Chroniqueur radio
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