L’intelligence artificielle au secours de la rénovation !

21 février 2023

 

Le 14 février dernier, le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) a dévoilé sa nouvelle base de données nationale des bâtiments. Cet outil permet d’avoir une connaissance approfondie du parc immobilier pour faciliter les actions de rénovations massives.

L’intelligence artificielle, au cœur de l’actualité depuis quelques semaines, pourrait-elle venir au secours du besoin urgent de rénover notre patrimoine ?

Il faut savoir que les bâtiments rejettent actuellement 150 millions de tonnes de CO2 chaque année. Cela représente 30 % de l’empreinte carbone de la France. L’objectif en 2030 est de diminuer ces émissions à 100 millions de tonnes par an.

Avec 20 % du parc immobilier français considéré comme des passoires thermiques, il est fondamental de lancer un grand plan de rénovation énergétique. Pour être efficace, il est indispensable d’avoir un état des lieux précis des bâtiments en France. Le CSTB, qui est un établissement public, vient donc de dévoiler sa dernière version de la base de données nationale des bâtiments.

En quoi consiste cette base de données ?

Elle répertorie 38 millions de logements et près d’un milliard de m² de locaux tertiaires. Pour chaque bâtiment, elle collecte 250 critères comme l’année de construction, l’adresse, les matériaux de construction, les modes de chauffages utilisés ou encore l’étiquette du diagnostic de performance énergétique. Elle est capable d’établir une véritable fiche d’identité pour chacun des bâtiments résidentiels et tertiaires en France métropolitaine.

Comment cela fonctionne-t-il ?

La base de données nationale des bâtiments repose sur l’open data. Elle croise et géolocalise des données issues d’une trentaine d’organismes publics comme les données topographiques de l’IGN et la base nationale des adresses.

Certaines données étant incomplètes, l’interface utilise une intelligence artificielle pour prédire certaines valeurs manquantes. Un algorithme permet par exemple de simuler l’étiquette du diagnostic de performance énergétique.

Cette base de données sera actualisée en moyenne trois par an afin de suivre l’évolution du parc immobilier dans les prochaines années.

En tant que particulier, comment puis-je avoir accès à cette base de données ?

Très simple ! Vous pouvez y accéder directement sur le portail Internet Go Rénove Particuliers (https://particulier.gorenove.fr/). Il suffit ensuite de saisir l’adresse de votre bien immobilier pour avoir accès à la fiche d’identité et aux données collectées.

J’ai testé personnellement l’interface avec ma résidence principale. Je dois avouer que l’expérience est assez convaincante. En renseignant, de manière plus précise, le type de fenêtres, le mode de chauffage et les modalités d’isolation de mon bien, l’algorithme a défini une étiquette énergétique cohérente.

La plateforme permet-elle d’établir la liste des travaux de rénovation énergétique et le coût ?

Malheureusement non. Il s’agit d’une plateforme utilisant une base de données pour dresser un état des lieux afin de sensibiliser les particuliers sur la nécessité ou non d’entamer des travaux d’amélioration énergétique. Vous pouvez toutefois prendre contact par l’intermédiaire de l’interface avec un conseiller France Rénov’ qui est également un service public d’accompagnement pour estimer les travaux les plus adaptés, le budget nécessaire et les aides financières.

L’intelligence artificielle est-elle la clé pour sauver notre patrimoine ?

La base de données nationale des bâtiments est un outil indispensable pour accélérer la rénovation de notre parc immobilier.

Ceci étant dit, la loi contre le dérèglement climatique interdira à la location l’ensemble des passoires thermiques en 2034. Il faut savoir que les gestes individuels d’amélioration des performances énergétiques ne suffisent pas, même s’ils sont en nette augmentation ces dernières années. Pour être efficace, une rénovation énergétique doit être prise dans sa globalité. On estime que, pour passer d’une étiquette énergétique E à une étiquette D, le montant des travaux s’élève aux alentours de 30 000 €. Ce montant très important freine la plupart des ménages qui n’ont pas accès aux aides de l’État.

Pour réussir cet immense défi, la rénovation énergétique doit devenir un véritable attribut régalien. Les aides financières accordées ne doivent plus être sous conditions de ressources. L’État doit investir massivement, comme il le fait pour le déploiement des énergies renouvelables. Ce sont 20 milliards par an qu’il faudrait investir pour la rénovation de nos passoires thermiques dans les 10 prochaines années. Sans oublier le développement urgent de la filière industrielle pour sécuriser l’approvisionnement des matières premières nécessaires aux travaux de rénovation et surtout former une main-d’œuvre qualifiée et en quantité suffisante.

L’intelligence artificielle est un outil puissant d’aide à la décision, encore faut-il avoir une véritable stratégie à la hauteur des enjeux.


Guillaume MILLO
Expert en rénovation de bâtiments anciens
Auteur – Chroniqueur radio
LinkedIn: linkedin.com/in/guillaume-millo
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