Retour à l’âge de pierre !

22 janvier 2024

 

 

La demande en pierre de taille, en France, augmente ces dernières années dans le secteur du bâtiment.

Dans une précédente chronique, nous avions vu que le béton était un matériau très polluant pour notre environnement.

 

La pierre de taille pourrait-elle remplacer le béton pour construire nos bâtiments ? Quelles sont les perspectives dans ce secteur ? Sommes-nous face à un retour de l’âge de pierre ?

En effet, beaucoup de nouveaux quartiers utilisent la pierre de taille comme matériau de construction.

Par exemple, il est construit actuellement un programme de 600 logements, dont 40 % de logements sociaux, en pierre de taille à Clamart, dans les Hauts-de-Seine.

Les bâtiments en pierre ne sont donc plus réservés aux constructions bourgeoises et les initiatives se multiplient dans la construction neuve, mais également dans la rénovation.

 

Quels sont les principaux avantages de construire avec de la pierre de taille ?

La pierre, utilisée principalement pour habiller les façades des bâtiments, est plus durable, plus qualitative et facile à entretenir.

C’est un matériau 100 % naturel avec de bonnes performances thermiques qui ne subit aucune transformation pour sa mise en œuvre. Pas besoin de cuisson ou de traitement spécifique. Il n’y a que la découpe en carrière pour pouvoir directement l’utiliser.

La pierre a également un excellent bilan carbone. En région parisienne, par exemple, la plupart des carrières d’extraction se situent à moins de 100 kilomètres des chantiers.

 

Le coût de construction est-il plus élevé avec la pierre ?

Le coût d’une construction utilisant la pierre de taille est en effet plus élevé. On estime en moyenne que le coût global augmente de 10 à 15 %.

En revanche, la durée entre deux ravalements est plus longue et se fait par un simple nettoyage. Pas besoin de décroûter ni de refaire des enduits.

La pierre participe également à diminuer les consommations d’énergie avec de meilleures performances thermiques.

Il faut donc raisonner en coût global sur le cycle de vie complet d’un bâtiment.

 

Pour quelles raisons avons-nous abandonné les constructions en pierre ?

30 % du patrimoine immobilier français actuel a été construit avant la Seconde Guerre mondiale. À l’époque nous utilisions des matériaux naturels comme la pierre et le bois pour construire nos bâtiments.

Après la Seconde Guerre mondiale, nous estimons un déficit de 4 millions de logements en France. L’État décide de lancer le plan de reconstruction de la France avec l’objectif de construire 240 000 logements neufs par an. C’est alors que l’industrie de la construction s’est organisée autour du béton armé permettant de reconstruire vite et à bas coûts.

Les techniques traditionnelles ont été abandonnées au profit de techniques industrielles standardisées.

 

Cette filière renaissante offre-t-elle de nouvelles opportunités pour les jeunes générations ?

La filière de la pierre pourrait, en effet, séduire les nouvelles générations en quête de sens. La pierre est un matériau naturel bas carbone qui offre une solution face aux enjeux climatiques.

Le secteur offre un panel de métiers très diversifiés en France et à l’international. Les jeunes peuvent devenir tailleurs de pierre, mais également carriers, graveurs ou restaurateurs du patrimoine. Ils peuvent aussi devenir architectes et maîtres d’œuvre spécialisés.

Dès la fin du collège, les adolescents peuvent apprendre les métiers de la pierre en intégrant, par exemple, l’association ouvrière des Compagnons du devoir.

 

Serait-il possible de remplacer le béton par la pierre comme réponse aux enjeux du réchauffement climatique ?

Dans les nouveaux bâtiments, la pierre est surtout utilisée comme parement des façades. Elle apporte de la noblesse, de la durabilité et de bonnes performances.

En revanche, son rôle structurel est très limité. L’ossature résistante des bâtiments est majoritairement réalisée en béton armé. Il serait très difficile, par exemple, de construire une tour de 30 étages uniquement en pierre et en bois.

En France, la pierre ne représente que 4 % des matériaux utilisés dans la construction. Le béton reste donc hégémonique dans notre civilisation. Le remplacer totalement pour revenir aux techniques de construction anciennes semble actuellement utopique.

Mais la réponse aux enjeux climatiques est multiple. En stimulant le secteur et en créant des vocations, je pense que la pierre a un rôle à jouer très important pour décarboner nos usages.


Guillaume MILLO
Expert en rénovation de bâtiments anciens
Auteur – Chroniqueur radio
LinkedIn: linkedin.com/in/guillaume-millo
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