Révision du DPE : impact réel ou simple illusion ?

26 février 2024

 

Mi-février, le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, a annoncé des mesures de simplifications pour fiabiliser le calcul du DPE.

Quels sont les impacts pour les ménages français et les interdictions de location ? Y aura-t-il d’autres ajustements pour alléger les contraintes de la rénovation énergétique ?

 

Mais d’abord, pouvons-nous rappeler à quoi sert précisément le DPE ?

Le diagnostic de performance énergétique ou DPE a été lancé en 2002 pour fournir aux propriétaires, aux acquéreurs et aux locataires une indication sur la performance énergétique d’un bien immobilier.

En 2021, le DPE a subi une refonte pour corriger les manques de fiabilité et fournir à l’État français un outil pour bâtir sa politique d’interdiction, d’obligations et d’incitation à la rénovation énergétique. Le DPE est donc le pilier de toute la politique énergétique dans le secteur résidentiel.

 

Quels sont les enjeux pour la France et les ménages ?

En 2022, le secteur résidentiel était responsable de 28 % de la consommation d’énergie finale de la France dont un tiers était du gaz naturel importé.

Les enjeux de la rénovation énergétique sont donc très importants, d’une part, pour la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre dans la lutte contre le réchauffement climatique et, d’autre part, pour augmenter notre souveraineté énergétique en diminuant notre consommation de gaz.

 

Quel est le planning à venir des interdictions de location fixé par le gouvernement ?

Dans moins d’un an, la loi prévoit d’interdire à la location, au 1er janvier 2025, tous les logements possédant une étiquette G. Ce sont près de 2,5 millions de logements qui sont potentiellement concernés par ces interdictions, dont 336 000 résidences principales. Il est important de préciser que ce sont majoritairement les résidences secondaires et les logements vacants qui portent l’étiquette G.

Les interdictions s’appliqueront à la fin d’un bail locatif en cours si des travaux de rénovation énergétique ne sont pas entrepris.

 

Quelles sont ces nouvelles mesures d’assouplissements annoncées par le gouvernement ?

Plusieurs enquêtes et particulièrement celle réalisée par l’UFC-Que Choisir en septembre 2022 ont révélé le manque de fiabilité du DPE. Il peut y avoir jusqu’à trois étiquettes d’écart pour un même bien faisant l’objet de plusieurs DPE réalisés par des diagnostiqueurs différents.

Actuellement, ce sont surtout les biens de petites surfaces qui sont victimes de ces erreurs d’appréciation.

La mesure gouvernementale permet de corriger ce biais des petites surfaces. La méthode de calcul actuelle reste inchangée. Seuls les coefficients de pondération et l’indice de compacité thermique sont révisés pour les logements inférieurs à 40 m².

 

Combien de logements vont bénéficier de ce réajustement ?

L’État a annoncé qu’au 1er juillet 2024 140 000 logements sortiront des étiquettes F et G, considérés comme des passoires thermiques.

Pour nos lecteurs ayant réalisé un DPE récemment, vous pouvez vous rendre directement sur le site de l’ADEME. Si votre logement fait moins de 40 m² avec une étiquette F ou G, il vous suffit de saisir le numéro à 13 caractères de votre DPE et l’interface calculera automatiquement votre nouvelle étiquette. Vous pourrez donc vérifier si votre logement sortira du champ d’application des prochaines interdictions de location.

 

ADEME – Observatoire DPE – Audit (Diagnostic de Performance Énergétique Audit Energétique)

 

Cette mesure sera-t-elle suffisante pour apporter un peu plus de souplesse dans le calendrier des rénovations énergétiques ?

140 000 logements sur presque 7 millions de passoires thermiques classées F ou G, cela reste anecdotique. Bizarrement, cet assouplissement arrive au moment même où Bercy a annoncé une réduction budgétaire de l’aide à la rénovation énergétique MaPrimeRénov’ qui passe de 5 à 4 milliards d’euros en 2024 à cause des mauvaises prévisions des chiffres de croissance.

Pour finir, sachez que les interdictions de location vont se poursuivre jusqu’en 2034 pour éradiquer de notre parc immobilier les trois dernières étiquettes du DPE : E, F et G. Au global, ce sont 15 millions de logements qui sont concernés soit 40 % du parc immobilier français qu’il faut rénover en moins de 10 ans pour gagner au moins une étiquette.

Je pressens que d’autres mesures d’assouplissements arriveront dans les prochains mois et prochaines années.

Ressources complémentaires :

 

  • Chiffres 2022 de la Fédération française du bâtiment : chiffre d’affaires réalisé 166 milliards d’euros/1 730 000 actifs dont 70 % d’ouvriers, soit 1 211 000 ouvriers/137 000 euros par ouvrier, soit 11 500 euros par mois et par ouvrier.
  • Calcul du coût de la rénovation du parc immobilier français : 15 millions de logements à rénover en dix ans avec un coût moyen de 40 000 euros = 600 milliards d’euros, soit 60 milliards par an sur les dix prochaines années. Cela représente 36 % d’activité en plus dans le secteur du bâtiment et un besoin en ouvriers de 435 000 ouvriers.

 


Guillaume MILLO
Expert en rénovation de bâtiments anciens
Auteur – Chroniqueur radio
LinkedIn: linkedin.com/in/guillaume-millo
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